La présente exposition met de l’avant quatre des plus talentueux artistes présentement sur notre radar. Ce projet se veut une manière de contribuer à leurs élans… mais c’est aussi un cadeau pour l’équipe de la galerie et pour tous ceux et celles qui suivent sa programmation. Nous aurons le privilège d’approfondir ensemble la compréhension de pratiques artistiques des plus fascinantes et prometteuses.
RADAR
Ifeoma U. Anyaeji est une artiste néo-traditionnelle Nigérienne née à Benin City. Ayant grandit dans une société tiraillée entre l’excès et la répression, où l’art n’était pas considéré comme un emploi « sérieux », Ifeoma a entrepris de faire de l’art sa carrière à temps plein. En tant qu’artiste femme, elle repousse les limites et conventions de son initiale formation académique en peinture et a poursuivi son intérêt pour la sculpture et les démarches artistiques non-conventionnelles. En effet, sensible aux problèmes environnementaux éprouvés dans sa propre communauté, elle s’intéresse à réutiliser des objets mis au rebut tels que les sacs de plastiques et bouteilles non-biodégradables. Sa démarche consiste à transformer son médium avec une technique de tressage de cheveux Nigériennes en disparition nommée Threading. Ifeoma combine cette dernière à d’autres techniques traditionnelles de vannerie et de tissage de tissus. En résulte des œuvres sculpturales et des installations qui référent à des formes architecturales, des intérieures résidentielles et ameublements, des réitérations d’expériences culturelles et des réfexions sur le corps humain. En engageant la notion du « vieux », elle remet en question les implications de notre modernité : systèmes de surconsommation générant accumulation et gaspillage, définitions d’assimilation culturelle, le syndrome de la date d’expiration et les standards de beauté coloniaux. Ifeoma a exposé dans plusieurs institutions tels que, récemment, le Musée national d’art contemporain d’Athènes (EMST) et la Fondation Villa Datris pour la sculpture de Paris.
Nathan Eugene Carson (vit et travaille à Hamilton, Ontario) a obtenu son baccalauréat en arts visuels au Ontario College of Art and Design en 2005. Sa plus récente exposition solo, Cut From The Same Cloth (avec les commissaires Laura Demers et Joséphine Denis), fut premièrement présentée au Power Plant en 2020 et poursuit présentement sa tournée dans plusieurs institutions canadiennes. L’ensemble de l’œuvre artistique de Carson fait le portrait d’expériences complexes héritées de la résistance intrinsèque et de la culture des communautés noires tout en remettant en perspectives les fausses représentations qui ont circulée dans l’histoire. Sa plus récente série de peintures sur papier est un épilogue optimiste composé d’actes transformatifs et d’une célébration de personnages dont l’apparence et la manière d’être non-conventionnelle nous rappelle que nous sommes tous de la même fibre. L’artiste explique : « Une partie de ma démarche, lorsque je commence à dessiner et peindre, est de récolter des vieux matériaux inutilisés tel que papier, carton et vielles cartes cadeaux. Je veux donner à ces matériaux une utilité nouvelle. J’essaye d’insuffler la vie dans chacune de mes œuvres. »
Clovis-Alexandre Desvarieux est né en Haïti et habite maintenant à Montréal. Il a complété des études en ingénierie à l’université Concordia avant de se consacrer aux arts visuels. Il explore des concepts universels par le prisme de la mythologie et de l’histoire d’Haïti. Il s’intéresse au plein potentiel auquel l’humain peut aspirer dans un contexte social. Les œuvres sélectionnées pour l‘exposition « Radar » sont des icônes représentant des divinités vaudous. Ainsi, Danbalaah Wedo (le père de tous les esprits qui personnifie la sagesse et la bonté) côtoie Jean Dantô (qui initie les mortels aux mystères) et Ministre Azaka Mede (le ministre de la moisson abondante). Notons également cette représentation de papa Legba (divinité de la frontière entre le visible et l’invisible) sur une porte de garde-robe. Desvarieux s’intéresse aux perceptions et aux manifestations des archétypes orchestrant la symphonie des sphères haïtiennes. Il puise dans l’univers narratif des grands maîtres de la peinture haïtienne tel que Hector Hyppolite, Philomé Obin, Jean-Claude Garoute, Louisianne Saint-Fleurant, ou André Pierre. Il marie délibérément ces influences à l’histoire de la peinture occidentale et plus particulièrement aux courants de l’expressionnisme abstrait et du cubisme.
Allie Gattor a complété un baccalauréat en anthropologie culturelle et une maitrise en muséologie. Elle est établie à Montréal. Elle s’est récemment démarquée dans le cadre d’événements dédiés aux artistes de la relève, tels Artch et l’initiative Créer des ponts d’Art Souterrain. Ses œuvres s’inscrivent dans un univers bidimensionnel où le stylo, le crayon, l’encre et l’aquarelle prennent vie sur des papiers de différentes tailles, du très petit au grandeur nature. Le processus créatif d’Allie Gattor commence par l’observation de la vie quotidienne. L’artiste est captivée par l’aspect marginal et subtil de certaines situations, émotions et personnes. Bien que son style rappelle les illustrations de livres d’enfants, ses œuvres surprennent par la combinaison du ludique à l’humour noir. Particulièrement attirée par l’étrangeté de la condition humaine, l’artiste transpose sur papier les situations et émotions qu’elle vit de manière à confectionner un monde imaginaire habité par une multitude de personnages. Ses œuvres touchent entres autres aux thèmes de l’ennui, l’anxiété, la frustration, la joie, l’absurdité, la naïveté et l’excès; le tout toujours avec une touche ludique.